La fabrication artisanale du makhila basque traditionnel, ce bâton de marche élégant et précieux, requiert un savoir-faire ancestral que l’Atelier Alberdi, basé à Irun en Espagne, est l’un des rares à faire perdurer depuis plusieurs générations. Symbole de la culture basque, le makhila s’offre principalement en témoignage de respect, véritable compagnon de route, et c’est aussi une arme blanche – en raison de la lame qu’elle cache – très répandue au 17ème siècle afin de se protéger.
Crédits photos : Atelier Alberdi
En 1980, Iñaki Alberdi se rendit compte que la création et la fabrication des makhilas était une tradition qui perdurait dans le Pays-Basque français alors qu’elle disparaissait dans le Pays-Basque espagnol, notamment en raison de la dictature de l’époque. C’est ce qui le poussa à se lancer dans cette aventure peu commune, à laquelle il a désormais consacré une grande partie de sa vie. Enfant déjà, il voyait son père et ses oncles pratiquer avec zèle la sculpture sur bois dans l’atelier familial fondé après la guerre, en 1948. Depuis cette époque, les makhilas Alberdi se sont retrouvés dans les mains de nombreuses personnalités.
Crédits photos : Atelier Alberdi
Benat Alberdi, le fils d’Iñaki, s’attache aujourd’hui à préserver le savoir-faire familial en reprenant les rênes de l’atelier depuis le départ de son père. « Quand mon père est parti à la retraite, je travaillais dans une entreprise commerciale et ça me faisait de la peine de laisser mourir ce savoir-faire unique. Nous sommes les seuls dans le Pays-Basque espagnol à proposer une fabrication traditionnelle des makhilas, entièrement artisanale. Même si au début je ne travaillais pas à l’atelier, j’ai appris le métier en observant mon père, et quand j’étais enfant, chaque fois que je voulais gagner un peu d’argent, mon père m’ouvrait gentiment les portes de son atelier. Sans le vouloir, j’ai appris ce métier. »
Les makhilas sont composés de cuir, de bois et de métaux de qualité que les artisans choisissent avec attention. La corne est le seul élément qui n’est pas travaillé à l’atelier et provient de Bretagne.
Crédits photos : Atelier Alberdi
Le travail du bois est l’étape la plus importante de la fabrication. Au printemps, les artisans vont chercher, dans des coins reclus des montagnes des Pyrénées, du bois de néflier sauvage. Un arbuste qui pousse très lentement, dont le bois est à la fois résistant et souple. Ils choisissent certaines branches sur lesquelles ils font alors de légères incisions en forme de vagues et tiretées au travers de l’écorce. Au début de l’hiver, les artisans reviennent et coupent les branches incisées – les arbres ne sont jamais coupés – pour les mettre au four afin de récolter les écorces. Les incisions se transforment en véritables ornementations et sont mises à sécher entre 7 et 10 ans avant leur utilisation. « C’est gratifiant de savoir qu’avec notre métier on apporte un grain de sable à la culture basque. »
« J’aimerais beaucoup que ma fille prenne la relève (…) mais si je travaille aujourd’hui le makhila, c’est aussi parce que mon père ne m’a jamais vraiment poussé à faire cela. Il m’a simplement montré le métier et m’a surtout démontré qu’il était heureux, que c’était un travail digne. »